Interview de Christine Loquet

Notre cycle d’interviews continue. Après Aurore Sohier, nous vous invitons à rencontrer Christine Loquet, membre de la Commission AccessibilitéS, bibliothécaire au parcours marqué par une attention permanente aux publics et un fort engagement pour ouvrir l’accès au livre et à la lecture au plus grand nombre, que ce soit à l’intérieur ou à l’extérieur des bibliothèques.

Photo de Christine Loquet

Pourrais-tu nous présenter ton parcours ?

J’ai un parcours qui a été très tôt marqué par la question des publics. J’ai fait des études de sociologie, et je me suis spécialisée en 3e cycle en sociologie des publics de la culture. Cette obsession pour les publics les plus éloignés ne vient pas de nulle part : fille de paysans, j’ai très vite été convaincue que beaucoup de gens étaient laissés à la porte de nos établissements culturels.

Bibliothécaire depuis 1997, j’ai travaillé dans les bibliothèques de Strasbourg puis Rennes, dirigé une médiathèque de taille moyenne, puis j’ai été pendant onze ans chargée de mission publics éloignés du livre et de la lecture au sein de la structure « Livre et lecture en Bretagne ». Cette mission a été l’occasion de découvrir de nouveaux publics, de nouveaux lieux, et de travailler avec des professionnels du monde du livre de différents horizons, autour de questions très variées. Je viens tout juste de quitter mon poste, non par désintérêt ni par lassitude, mais bien par envie d’explorer de nouvelles pistes d’action, du côté de l’édition et du Facile à Lire.

Comment as-tu rejoint la Commission de l’ABF ?

C’est à l’occasion de mon arrivée à « Livre et Lecture en Bretagne » que je me suis rapprochée de la commission. Le poste de chargée de mission « publics éloignés du livre et de la lecture » venait juste d’être créé. Les domaines couverts étaient nombreux : handicap, prison, illettrisme, hôpitaux… il y avait beaucoup à faire et beaucoup à défricher ! J’avais besoin d’aide, de contacts, d’échanges, et c’est ainsi que j’ai rejoint la Commission « Hôpitaux, prisons », dont est issue la commission AccessibilitéS d’aujourd’hui, après la fusion avec la commission Accessibib en 2019.

Y a-t-il des projets qui t’ont particulièrement marquée dans ton parcours ?

Il y en a beaucoup ! Ce qui me vient à l’esprit le plus spontanément, ce sont des projets en prison.

L’organisation y est toujours très compliquée mais les rencontres et les animations peuvent se révéler vraiment très fortes. Je pense notamment à « Parent(hèse)», un projet autour de la parentalité développé avec la chargée de mission régionale culture/justice. Il s’agissait d’organiser notamment des spectacles de lecture jeunesse dans les parloirs pour permettre aux détenus, souvent des papas, de partager un moment de lecture avec leurs enfants. Cela a pu faire un véritable déclic chez certains détenus qui prenaient conscience qu’ils pouvaient eux aussi lire des histoires à leurs enfants.

Dans un autre domaine, je pense aussi à certains projets autour du « Facile à Lire ». Avec la création du prix Facile à Lire en 2017, de nombreuses rencontres avec des auteurs ont été organisées dans des lieux où se trouvent des publics ayant des difficultés à lire (EHPAD, structures pour personnes en situation de handicap, allophones…). Ces rencontres pouvaient être très fortes car c’était l’occasion pour ces personnes d’oser prendre un livre, ou d’oser prendre la parole. C’est parfois décisif dans la vie d’une personne, et précieux de vivre ces moments-là.

Je garde aussi un vif souvenir d’une action sur la dyslexie. Sous l’impulsion de la bibliothèque des Champs Libres à Rennes régulièrement sollicitée sur ce sujet, un groupe de travail avait été monté, regroupant bibliothécaires et milieux associatifs. Nous avions organisé une rencontre fin 2016 aux Champs libres, lors desquelles étaient présents un groupe de collégiens dys et une jeune fille de 16 ans, Constance, qui avait composé un slam sur sa dyslexie. Cela avait été un moment très beau : les élèves étaient venus la prendre dans leurs bras, touchés par ce partage qui exprimait si bien ce qu’ils ressentaient. On mesure alors à quel point ces rencontres permettent de répondre à un besoin essentiel d’exprimer, de partager, de mettre des mots sur ce qu’on vit.

Qu’est-ce que tu as appris de ces expériences ?

Je dirais tout d’abord la prise de conscience en tant que professionnelle des freins qui peuvent exister pour entrer dans une bibliothèque. C’est ce dont on prend la mesure grâce aux paroles des personnes qu’on rencontre qui avouent ne pas se sentir à leur place en bibliothèque, ou qui pensent que les livres ne sont pas faits pour eux.

Cela permet alors de positionner le métier de bibliothécaire sur un plan plus humain, de se décentrer par rapport au rôle de prescripteur qu’on veut souvent avoir : si personne ne vient dans nos belles bibliothèques voir nos livres si soigneusement choisis, cela ne sert à rien ! Il est important, je crois, de se frotter aux non-publics. J’ai un exemple très précis en tête : souvent les bibliothèques de prison sont faites de bric et de broc, avec des collections issues de dons successifs, mais construites sur le modèle des bibliothèques à l’extérieur avec notamment beaucoup de romans, qui sortent très peu parce qu’ils ne correspondent pas aux attentes et aux goûts des détenus. Cela amène vraiment à questionner ce qu’on fait et ce qu’on ne fait pas en bibliothèque.

Est-ce que tu aurais un message à faire passer ?

On a souvent une image austère des problématiques liées aux « publics empêchés », à l’hôpital, au handicap. Personnellement je connaissais mal les questions liées au handicap, cela me semblait très technique mais quand j’ai commencé à explorer cette question, j’ai découvert la diversité des questions soulevées et j’ai participé à des projets très enrichissants et originaux, qu’il s’agisse par exemple de la constitution d’une banque de données de pictogrammes ou l’organisation de spectacles en langue des signes. Tout cela est très vivant, stimulant et laisse pas mal de place à l’imagination.

Aurais-tu un conseil à donner pour des collègues qui prendraient un poste sur des questions liées à l’accessibilité ? Par quel bout commencer ?

Ça dépend beaucoup du contexte et des priorités de l’établissement, bien sûr, mais je dirais de prendre les sujets les uns après les autres, car l’accessibilité, c’est comme une pelote. Il faut tirer les fils petit à petit, en essayant d’entraîner de plus en plus de collègues avec soi. Et bien sûr, autant que possible, toujours prendre du plaisir !

Pourrais-tu nous en dire un peu plus sur tes projets pour la suite ?

Je lance un projet dans l’édition, qui en est encore à ses premiers pas. En travaillant sur les questions du Facile à Lire avec Françoise Sarnowski, avec de nombreux acteurs, nous avons identifié le manque de bons ouvrages nativement faciles à lire – pour les adultes. Cette idée a mûri au sein de Livre et lecture en Bretagne, mais n’a pas pu y aboutir pour plusieurs raisons, dont celles du positionnement d’une structure régionale pour le livre. Le besoin, lui, est resté, et j’ai eu très envie de me lancer dans ce projet qui me semble plus qu’utile, et me passionne.

Mon idée est de développer une ou plusieurs collections de livres créés en inclusion, c’est à dire dont les textes seront simplifiés grâce à l’intervention des publics visés, sur le modèle de ce qui se fait en Belgique avec la collection « La Traversée » (Weyrich).

Par ailleurs, je viens de créer une structure de formation, Face publics, qui intervient sur la question des publics, et des publics empêchés en particulier, histoire de creuser encore un peu plus dans cette voie.

Affaires à suivre !

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Propos recueillis par Bélinda Missiroli, le 6 sptembre 2021.

Formation sur le « Rôle des bibliothèques en milieu pénitentiaire et auprès des personnes placées sous main de justice »

Médiaquitaine en partenariat avec ALCA propose les 29 et 30 avril prochains, une formation sur le rôle des bibliothèques en milieu pénitentiaire et auprès des personnes placées sous main de justice. Cette formation se déroulera en présentiel dans les locaux de Médiaquitaine/Université de Bordeaux.

Programme

JEUDI 29 AVRIL (accueil à partir de 9h)
9h30-11h30
Bibliothèques en milieu pénitentiaire : comment faire vivre les partenariats ?

Questionnements, partage d’expériences.
Présentation des participants et de leurs contextes
Échange sur les pratiques de chacun : relations entre bibliothèques partenaires et services pénitentiaires, coopération bibliothécaires/coordinateurs culturels : gestion des collections, formation des auxis, action culturelle…
Impact de la crise sanitaire (accès à l’offre de lecture, liens avec les auxis).

11h45-12h30
Présentation du Chalet bleu
, maison d’accueil de l’association MAI 33 (Maison d’Accueil et d’Information de Gironde) : accueil des familles, informations pratiques, accueil des enfants au Centre Pénitentiaire de Bordeaux Gradignan avant, pendant et après le parloir.
Marianne Auzimour, MAI 33

14h-16h
Présentation de l’association Lire c’est vivre
qui anime les bibliothèques du Centre pénitentiaire de Fleury-Mérogis et organise la formation délivrée aux détenus auxiliaires de bibliothèque, en partenariat avec l’ABF.
Lena Rosales Sarrut, bibliothécaire, Lire c’est vivre
Témoignage de Stéphane Allemand, ancien auxi bibliothécaire, association Auxilia, une nouvelle chance

16h15-17h
Projection du film documentaire Entre les barreaux les mots, réalisé par Pauline Pelsy-Johann sur l’association Lire C’est Vivre en 2017.

VENDREDI 30 AVRIL
9h15-10h30 (en visioconférence)
Soutenir le développement de la lecture auprès de publics empêchés de lire
: l’aide aux bibliothèques et aux associations par le Centre National du Livre
Présentation de dossiers retenus pour des bibliothèques en milieu carcéral, conseils pratiques.
Marie Grimaud, instructrice au pôle Bibliothèques, CNL

10h45-12h30
Le travail d’intérêt général en bibliothèque
: présentation du dispositif et de son fonctionnement.
Maryssa Miquel, référente territoriale TIG Gironde et Mme Morin, CPIP, SPIP de la Gironde
Témoignage de Noëlle Biancolin, responsable de la Bibliothèque des Enfants, Bibliothèque de Bordeaux

14h-16h30
L’atelier « Du tricot et des mots » au Centre Pénitentiaire de Bordeaux-Gradignan
Des rencontres avec des artistes
Marianne Auzimour
, bénévole et Florence Dekindt, intervenante pour la Bibliothèque de Bordeaux
Un atelier origami au Centre Pénitentiaire : témoignage de Sayaka Hodoshima, Studiorigami

16h30-17h
Bilan des deux journées

Pour plus de détails : https://www.crfcb.fr/#/program/81/6561/?from=program(%7Bcode:%26%2334;bordeaux%26%2334;%7D)

En 2021, j’adhère à l’ABF !

2020, une année complexe qui n’a pas épargné l’ABF :
• report à deux reprises du congrès national ;
• publications, plus de format papier ! Bibliothèque(s) et le dernier Médiathèmes uniquement en format PDF ;
• annulation des journées d’étude ;
• fermeture d’un groupe régional et de son site de formation ;
• moins de 2 000 adhérent·e·s ! le nombre baisse chaque année alors qu’une association se doit d’être forte en nombre pour faire entendre sa voix.

Mais 2020 est aussi marquée par des actions fortes de l’ABF pour faire face :
• mise en place d’une veille et d’une permanence par mail de la commission RH ;
• ouverture d’un dialogue régulier avec le ministère afin d’organiser aux mieux la réouverture de nos établissements ;
• création de biblio-covid.fr pour accompagner les bibliothèques durant les confinements et déconfinements ;
• publication de communiqués pour défendre la profession ;
• maintien des cours de la formation d’auxiliaire de bibliothèque malgré la pandémie ;
• partenariat étroit avec les autres associations professionnelles.

Tout cela a été possible grâce à une mobilisation massive des membres de l’ABF pour nous accompagner et répondre au mieux à nos interrogations tout au long de cette année. Un grand merci à vous tou·te·s qui faites vivre l’association. Plus que jamais en 2021, nous avons besoin de votre soutien, adhérez à l’ABF !

Pour une adhésion individuelle, c’est ici.

Pour un adhésion collectivités, c’est .

+ DE 100 IDÉES POUR CHANGER TA BIB – Le dossier du numéro 100 de la revue Bibliothèque(s) de l’ABF

Couverture du numéro 100 de la revue Bibliothèque(s)
Barbada de Barbades, drag queen intervenante pour l’heure du conte dans les bibliothèques de la région de Montréal, et qui a accepté de faire la couverture dont nous sommes si fières.
Crédit photo : © Matt Sirois

Nous avons eu l’honneur de nous voir confier le dossier du numéro 100 de Bibliothèque(s). Intitulé “+ de 100 idées pour changer le monde ta bib !”, le dossier compte 178 idées qui témoignent du dynamisme sans cesse renouvelé des bibliothèques, et de la nécessaire adaptation de nos métiers à la société !

Nous avons essayé de relever le défi d’un non-inventaire à la Prévert, en essayant de couvrir au mieux tous les sujets, pour toutes les compétences et pour tous les budgets… Nous avons reçu pour cela l’aide de nombreux·euses bibliothécaires qui nous ont proposé des idées et envoyé des informations précieuses. Merci à elles et eux !

Parmi ces idées, nous avons eu à cœur de citer des exemples illustrant les problématiques d’accessibilité en bibliothèque pour les publics empêchés, en situation de handicap ou d’illettrisme, valeurs que défend la commission AccessibilitéS de l’ABF.

Nous vous proposons donc ici quelques extraits de ce numéro sur ces thématiques, en guise d’ “apéritif de confinement”, en attendant d’avoir le numéro papier dans les mains… 🙂

En espérant que cela vous donne de l’inspiration et des envies de changer… votre bibliothèque… puis le monde !

Nathalie Étienne et Amandine Jacquet

Voici les codes que nous avons utilisés pour mentionner les bibliothèques : Nom de la bibliothèque ou Commune (Type, (Communauté de) Communes, Département ou Pays, Nombre d’habitant·e·s).

Les types de bibliothèques ont été codés de la façon suivante :

  • BP : Bibliothèque publique
  • BD : Bibliothèque départementale

#2 Un espace identifié “facile à lire”

Photo de l'espace "Facile à lire" à la médiathèque de Pierresvives
Crédit photo : CC BY-SA Charlotte Henard

Un espace pour tous et toutes qui présente de face, une sélection d’ouvrages « Faciles à lire », choisis pour leurs critères d’accessibilité et de lisibilité, à la médiathèque de Pierresvives (BD, site ouvert aux publics, Montpellier, Méditerranée Métropole, Hérault, 465 100 hab.). Ces livres bénéficient d’un accompagnement auprès des publics en fragilité linguistique : personnes en situation d’illettrisme, de français langue étrangère, d’alphabétisation, d’empêchement ou de handicap, etc. Un logo permet de les identifier facilement.

logo "Facile à lire"

Voir aussi le Communiqué Facile à lire et d’autres articles concernant Facile à lire sur le blog Accessibib.

#8 Une histoire par téléphone

La bibliothèque de Toronto (BP, Canada, 2 700 000 hab.,) propose aux enfants de 3 à 12 ans d’écouter gratuitement une histoire par téléphone à tout moment de la journée en appelant le service Dial-A-Story (“Appelle une histoire”) de la bibliothèque. 16 langues sont disponibles. Des magnets offerts avec les coordonnées téléphoniques sont à disposition sur les étagères des sections jeunesse des bibliothèques de Toronto.

Découvrez d’autres idées pour aider les enfants à accéder à la littérature jeunesse dans le numéro 100 de Bibliothèque(s). Vous y trouverez par exemple : des chapeaux à histoires (#7),  un Bibphone (#9), ou encore des petits défis à relever seul.e ou en famille (#11) !

Affiche de la bibliothèque de Toronto avec le texte :
Dial-a-Story 416-395-5400
Listen anytime. Available in 15 languages.
tpl.ca/dial-a-story
Crédit photo : © Toronto Public Library

#29 Mallettes adaptées aux DYS

Le réseau des bibliothèques publiques de Suède a mis en place «L’étagère de la Pomme» (Äppelhyllan) : c’est un fonds spécifique pour les enfants avec des besoins spéciaux (dyslexie, difficulté d’apprentissage de la lecture, apprentissage de la langue des signes…) comprenant entre autres des livres tactiles et des mallettes thématiques contenant un livre, la peluche du personnage de l’histoire et des fiches avec les mots et les images de l’histoire.

Les mallettes sont prêtées aux familles avec des enfants DYS ou en situation de difficulté dans l’apprentissage de la compétence lecture, et aux professionnel·le·s concerné·e·s.

D’autres types de prêts en sacs, sacs à dos ou en mallettes à découvrir dans le numéro 100 de Bibliothèque(s).

Lire des articles sur les propositions des bibliothèques concernant les personnes dyslexiques sur le blog Accessibib.

Mallette adapté pour les DYS autour de Mimi la Souris, à la bibliothèque centrale de Goteborg (BP, Suède, 543 000 hab.).
Mallette adapté pour les DYS autour de Mimi la Souris, à la bibliothèque centrale de Goteborg (BP, Suède, 543 000 hab.).
Crédits photos : CC BY-SA Amandine Jacquet

#38 Lire au chien

Afin d’aider les enfants à développer leurs compétences en matière de lecture, ou même dans le cadre de programmes de lutte contre l’illettrisme, certaines bibliothèques proposent de faire la lecture à un chien. En effet, « le chien est une présence vivante qui, contrairement à l’être humain, ne juge pas, ne corrige pas. Lorsqu’on est sans cesse arrêté par les enseignant·e·s, les parents, les orthophonistes, cela n’encourage pas à poursuivre. Le chien offre une écoute bienveillante, chaleureuse, l’enfant est soutenu dans l’effort. », souligne Sophie Jacques, directrice de la médiathèque d’Illkirch Graffenstaden (BP, Bas-Rhin, ‎26 800 hab). Cette bibliothèque a invité un chien et sa médiatrice à venir rencontrer les publics ponctuellement en 2016-2017.

Mais ce service est généralement proposé de manière pérenne et régulière en bibliothèque, comme à Sello (BP, Helsinki, Finlande, 642 000 hab.), Halifax (BP, Canada, 390 100 hab.), Tallinn (BP, Estonie, 426 500 hab.) et le Comté d’El Paso (BP, Colorado, USA, 650 200 hab.). Les Finlandais ont même adapté le concept avec des “vaches de lecture” pour les visites scolaires à la ferme…    

#73 Des outils pour un confort visuel

Affiche de la bibliothèque des Champs libres de Rennes avec le texte : bibliothèque accessible

[…] La BML (BP, Lyon, Rhône, 516 100 hab.) propose un panel d’outils adaptés aux personnes qui lisent difficilement l’imprimé. Des scanners et logiciels de reconnaissance de caractères, des machines à lire qui numérisent tout document imprimé avant d’en faire la lecture grâce à une voix de synthèse, et des loupes numériques : en posant la loupe sur le document à lire ou en utilisant la fonction photo pour capter une image à distance, il est possible de grossir et modifier l’affichage (choix du grossissement, couleurs de fonds et de texte, contraste et luminosité… ).

Vu aussi à la médiathèque du pays de Lunel (BP, Hérault, 25 000 hab.).

De manière plus générale, les bibliothèques s’engagent à favoriser l’accès des personnes en situation de handicap à l’ensemble de leurs espaces et services, à travers la mise à disposition de collections et de matériels adaptés, des espaces et une programmation culturelle accessibles, ainsi qu’un service de médiation. C’est le cas du département « Lire autrement » de l’Alcazar (BP, Marseille, Bouches-du-Rhône, 862 000 hab.) et de l’espace Borges des Champs-Libres (BP, Rennes, Ille-et-Vilaine, 215 000 hab.) qui proposent une informatique adaptée et des collections spécifiques : plage et imprimante braille, téléagrandisseur, scanner avec reconnaissance de caractères, machine à lire, loupes, lecteurs Daisy, logiciels et ressources numériques… 

Retrouvez un exemple de communication décalée pour les appareils Victor (format Daisy #178) dans le numéro 100 de Bibliothèque(s).

Lire des articles relatifs aux personnes en situation de déficience visuelle en bibliothèque sur le blog Accessibib.

#110 Garder le lien malgré l’incarcération

L’accessibilité ne se limite pas à des questions de bâtiment ou de format de documents. Cette problématique est fortement corrélée à la question des publics empêchés et peut déboucher sur des initiatives liées au maintien du lien parents-enfant en cas d’incarcération. La bibliothèque de Brooklyn  (BP, État de New York, USA, 2 533 000 hab.) organise  la lecture d’albums entre enfants et parents en prison, par écran interposé, appelée «TeleStory». Un programme similaire a été implanté à New York (BP, État de New York, USA, 8 623 000 hab.) : visant à améliorer les compétences en lecture tout autant que les relations entre les parents incarcérés et leurs enfants, le programme «Daddy & Me» (et «Mommy & Me») invitait les parents à enregistrer une histoire lue à voix-haute sur un CD qui était ensuite envoyé à l’enfant.

Lire des articles relatifs aux bibliothèques de prison sur le blog AccessibilitéS.

#113 Un accompagnement aux démarches e-administratives

Pour accompagner les publics dans leurs démarches administratives en ligne mais aussi les aider à la rédaction et la mise en forme de courriers, CV, lettre de motivation…, des permanences administratives hebdomadaires sont assurées par une écrivaine publique numérique à la bibliothèque Anne Frank (BP, Saint-Nazaire, Loire-Atlantique, 70 000 hab.) ou par des bibliothécaires (formé·e·s) à Valence Romans Agglo (BP, Drôme, 223 000 hab.) et à Signy-l’Abbaye (BP, Ardennes, 1 400 hab.).

Vu aussi à la BMVR (BP, Marseille, Bouches-du-Rhône, 862 000 hab.) où une association de bénévoles intervient pour tous types de courriers, y compris personnels. En complément, la bibliothèque de Pantin  (BP, Seine-Saint-Denis, 55 000 hab.)  propose une aide à la préparation d’entretiens d’embauche, et l’animatrice multimédia de Cazals (BP, Cazals-Salviac, Lot,  5 300 hab) propose une aide à  la déclaration d’impôts en ligne.

Affiche de la médiathèque publique et universitaire - Valence avec le texte :
Permanences administratives les mercredis, 14h à 17h.
*sauf pendant les vacances scolaires.
Entrée libre dans la limite des places disponibles.
Crédit photo : © Médiathèque de Valence Romans-Agglo

#115 Une bibliothèque mobile pour les sans-abri

Crédit photo  : © Street books

« Street Books » est une bibliothèque mobile à vélo, au service des sans-abri de Portland (BP, Oregon, USA, 3 831 100 hab.). Ceux et celles qui l’animent sont des bénévoles qui vont à la rencontre des personnes vivant dans la rue. Les nouveaux·elles adhérent·e·s reçoivent une carte de bibliothèque sans être tenu·e·s de présenter une preuve d’adresse ou d’identité. Au départ, les sceptiques ont déclaré que les livres ne seraient pas restitués.  Même si les sans-abri ont des préoccupations plus urgentes que de rendre un livre de bibliothèque, il s’avère que ça fonctionne plutôt bien, avec un taux de rendu élevé parmi les usager·ère·s régulier·ère·s. Et si parfois certains ouvrages ne sont pas rendus (pluie ou vol), aucune pénalité ne leur est demandée. Chaque retour de livre est un moment fort à célébrer. C’est pourquoi les usager·ère·s sont invité·e·s à être photographié·e·s, pour alimenter  une page du site.

Vu aussi à Bruxelles,  avec l’association Douche Flux.

 D’autres actions au plus près des publics (dans les piscines et les parcs #169,  dans la rue #168 à vélo #171 ou en bibliobus #172…)  à découvrir dans le numéro 100 de Bibliothèque(s).

logo Streetbooks

#117 Une heure du conte inclusive

Crédit photo : © BAnQ

BAnQ (BP, Québec, 542 000 hab.) propose régulièrement aux enfants qui ont des besoins particuliers ou qui ont été diagnostiqués dans le spectre de l’autisme, de participer à cette heure du conte interactive ouverte à tou·te·s. La·le bibliothécaire présente aux participant·e·s l’horaire visuel à l’aide de pictogrammes, puis propose une lecture animée d’une histoire. La Chasse à l’ours de Michael Rosen a par exemple, été sélectionnée en raison de son contenu répétitif qui permet d’anticiper les événements dans l’histoire. Six lieux visités à travers l’histoire avec six sachets à manipuler et à sentir. En fin de séance, un court métrage de sensibilisation à la différence est présenté aux participant·e·s. L’heure du conte se termine avec la fabrication d’un bricolage avec différentes matières à toucher. […]

Description d'une "Heure du conte inclusive" : 
Les enfants qui ont des besoins particuliers ou qui manifestent des troubles du spectre de l'autisme peuvent participer avec leur famille à cette heure du conte interactive.
Dans le cadre de Octobre, mois de l'accessibilité universelle, une initiative des Bibliothèques de Montréal.
Les enfants de moins de 8 ans doivent être supervisés par une personne de 12 ans ou plus.

Lire des articles relatifs à l’accueil des personnes autistes en bibliothèque sur le blog Accessibib.

#118 Des séances de cinéma en audiodescription

À Bourges (BP, Cher, 65 500 hab.), la bibliothèque propose des séances « Voir avec les oreilles » qui font se rencontrer des personnes non-voyantes et malvoyantes, et le grand public qui accepte de se bander les yeux durant le film. Un court-métrage est projeté en audiodescription. À l’issue de cette première projection, chacun·e exprime son ressenti et ce qu’elle·il a imaginé. Une deuxième projection suit avec les images et le bandeau retiré. Des échanges sur les différences de ressenti s’engagent entre les publics. C’est l’occasion pour les personnes non/malvoyantes de témoigner sur leur quotidien et pour l’équipe, de présenter les médias accessibles aux non-voyant·e·s disponibles à la médiathèque : films en audiodescription équipés en braille, livres tactiles et en braille, livres lus… L’objectif de ces séances est de sensibiliser, de dédramatiser, et de briser l’isolement des personnes non-voyantes et malvoyantes, tout en leur rendant accessible la culture au sein des bibliothèques.

Vu aussi à Dijon (BP, Côte-d’Or, 155 000 hab.) et Montpellier (BP, Méditerranée Métropole, Hérault, 465 100 hab.).

pictogramme audiodescription

Lire des articles relatifs aux personnes en situation de déficience visuelle en bibliothèque sur le blog Accessibib.

#170 Des livres dans les halls d’immeubles

Une planche, deux tréteaux, quelques cartons, le SMAE, Service médiation et action éducative des bibliothèques de Rennes (BP, Ille-et-Vilaine, 215 000 hab.) organise depuis plusieurs années l’opération « Bibli-hall ». Ce projet construit en partenariat avec les bailleurs sociaux Aiguillon construction et Archipel habitat ne peut se dérouler sans l’implication de l’agent de proximité ou d’un collectif d’habitants, acteurs essentiels dans la relation avec les résidents des immeubles. Plusieurs fois par an, de 16h à 19h, l’équipe bibliothèque s’installe dans les halls d’immeuble et propose le prêt gratuit d’ouvrages. Ces rendez-vous réguliers sont devenus incontournables pour des habitants qui n’osent pas toujours franchir les portes des bibliothèques. Une action mise en valeur en début d’année dans les abribus de la ville.

Crédit photo : © Bibliothèques de Rennes

D’autres actions hors-les-murs à découvrir – entre autres ! – dans le numéro 100 de Bibliothèque(s) avril 2020.

Pour vous le procurer, c’est par là !

Les auteures :

Après avoir travaillé à la bibliothèque municipale de Valence, Nathalie Étienne occupe désormais un poste d’assistante à la Médiathèque Départementale de la Drôme à CREST (site ouvert aux publics). Elle est responsable du secteur musique et de la communication. Amateure de street art, elle y a organisé divers événements (Yarnbombing, Inside Out Project). Son compte Instagram @knittie_librarian est le reflet de cet intérêt. Elle a collaboré avec Amandine Jacquet à élaborer le dossier « + de 100 idées pour changer ta bib» du numéro 100 de la revue Bibliothèque(s) (ABF, 2020).

Bibliothécaire et formatrice, Amandine Jacquet a travaillé en bibliothèques municipales et départementales, puis à l’Enssib, avant de devenir formatrice et consultante pour les bibliothèques. Elle est membre de la commission internationale de l’ABF et de la section Management des Associations de Bibliothèques (MLAS) de l’IFLA. Elle a coordonné l’ouvrage Bibliothèques troisième lieu (ABF, 2e édition revue et augmentée en 2017, publication en italien 2018), ainsi que l’ouvrage Concevoir une bibliothèque rurale (ABF-ABD, 2018). Elle a collaboré avec Nathalie Étienne à élaborer le dossier « + de 100 idées pour changer ta bib» du numéro 100 de la revue Bibliothèque(s) (ABF, 2020).

De la lecture en prison en période de confinement – double peine ou occasion d’innover ?

Depuis le début du confinement , les bibliothèques et bibliothécaires de France rivalisent de créativité et d’imagination pour faire vivre leurs services autrement et développer ce qui est accessible à distance. Heures du conte, vidéos, playlist, projets participatifs….

Les offres à distance foisonnent entre visites virtuelles de musées, opéras, cinéma en ligne, ressources d’autoformation. Comme le montre l’enquête initiée par le ministère de la Culture, les ressources numériques connaissent un plein essor en cette période particulière.

Qu’en est-il en milieu pénitentiaire, où toutes ces ressources sont inaccessibles , où l’accès « à distance » est impossible et où, en raison des contraintes sanitaires, les activités culturelles sont toutes stoppées, de même que les moments qui rythment habituellement le quotidien des détenus et assurent le lien avec l’extérieur (cours, parloirs etc.) ?

Homme lisant assis devant un grillage
Crédit photo : Livre et lecture en Bretagne – Quartier Livre

Nous avons relevé déjà de belles initiatives :

  • à la maison d’arrêt de Nantes, une bibliothèque ambulante est en place, et des outils ont été développés depuis l’extérieur par l’équipe des coordinatrices culturelles ;
  • Dans le Sud Ouest des coordinateurs culturels ont souhaité maintenir le lien avec les personnes détenues et la détention en créant une Gazette culturelle qui propose des petits articles culturels et humoristiques : actualité/ philosophie/ recette/ idée d’émission radio ou télé à écouter… Elle est distribuée toutes les semaines aux personnes détenues du CP de Bordeaux-Gradignan et bientôt dans d’autres établissements.
  • l’émission « Déconfinés : lire pour s’en sortir » destinée aux personnes détenues, est diffusée chaque vendredi soir sur La Chaîne Parlementaire ;
  • dans d’autres prisons, l’auxi bibliothécaire passe de cellule en cellule avec le catalogue papier de la bibliothèque, et ainsi répondre aux premières demandes de lectures des détenus ;
  • dans l’ouest encore, des émissions et autres contenus sur le livre sont proposés depuis l’extérieur, et passent sur les télévisions via les canaux vidéo internes ;
  • dans plusieurs établissements, des rendez-vous individuels à la bibliothèque sont proposés, en présence si possible de l’auxi-bibliothécaire en poste ;
  • parfois un chariot de livres sélectionnés passe de cellule en cellule, et permet de répondre aux premières demandes de lecture des détenus.

Ce qu’on pourrait imaginer ou envisager encore :

De la lecture à voix haute, à partir de textes sélectionnés, correspondant aux souhaits des détenus et à la situation de confinement, à offrir aux personnes détenues via les canaux vidéo internes ;

Des prêts de liseuses en nombre avec des textes récents (et tant pis pour la connectivité des liseuses, en cette période particulière on peut bien faire une croix sur quelques règles drastiques de sécurité).

Et enfin quelques recommandations qui s’imposent :

Pour mettre en place une offre de lecture, même au minimum, nous préconisons :

  • un auxi-bibliothécaire en activité, pour accompagner l’offre de lecture,
  • des prêts en nombre suffisant ou des durées de prêt allongées,
  • au retour des livres, une « désinfection » systématique de tous les livres ; même si la désinfection n’est habituellement pas possible en détention, la situation actuelle l’impose.

Comme nous, les détenus sont « confinés ». Encore plus que nous, ils n’ont à accès à rien (en dehors de la télévision). Ne les oublions pas, et profitons pourquoi pas de cette période pour innover, et proposer une offre de lecture attractive et différente !

Si vous aussi avez développé une offre de lecture particulière en détention, n’hésitez pas à nous en faire part, elle pourra compléter cette liste  (qui n’est pas exhaustive) : accessibilites@abf.asso.fr